Les trois naissances de Virginie: Roman by Jeanne Cressanges

Les trois naissances de Virginie: Roman by Jeanne Cressanges

Auteur:Jeanne Cressanges [Cressanges, Jeanne]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Julliard
Publié: 1995-01-02T00:00:00+00:00


JOHANN »

Le désir que Virginie avait ressenti, au Crotoy, de rencontrer cet homme s’imposa à elle avec un caractère d’absolu. Non seulement il lui semblait qu’il fût le seul à connaître le drame de sa mère (Pourquoi s’accusait-elle d’avoir tué son enfant alors qu’il s’agissait d’un accident ? Partant pour Vienne, dans quel camp dont on ne revenait pas voulait-elle se rendre ?), mais la personnalité même du musicien l’intriguait. Mamy Pauline leur avait enseigné, à Vincent et à elle, les horreurs du fascisme, s’indignant parfois que le peuple allemand en refusât le souvenir. Virginie n’aurait pu imaginer qu’il avait altéré à cœur des consciences et des vies. Par Solange elle avait fouillé le terreau où plongeaient ses racines maternelles. Pourquoi ne pas partir aussi à la recherche de l’ombre oppressante de ce grand-père victime de l’holocauste qu’elle avait chassé de son esprit parce qu’elle avait vingt ans, que l’Europe pacifique des jeunes était l’idéal de sa génération ? Enfin, ces lettres, après ce qu’elle savait de la passion de Karine et les confidences de Solange, semblaient lui ouvrir un chemin qu’elle s’était toujours refusé : la découverte des multiples faces de l’amour, de celui dont Johann avait un jour écrit à Claire : « Seule ta chair m’a donné le sentiment du sacré. »

C’est à Marguerite Dufaut que Virginie confia en premier sa volonté de retrouver Johann.

— C’est un météore, s’écria la chanteuse. Comment le joindre ? La seule chose que je puisse te promettre est de trouver son adresse personnelle, car celle de Gumpoldskirchen n’est peut-être plus bonne.

Il n’en avait pas changé. Virginie lui envoya un courrier l’informant de la mort de sa mère, qu’elle avait, de sa part, un document à lui remettre ; qu’elle pouvait, si une rencontre était possible, se rendre à Vienne à la date qui lui conviendrait. Quinze jours plus tard il lui écrivit : « Votre lettre, mademoiselle, m’a bouleversé. Je n’avais plus de nouvelles de votre mère depuis son départ de Vienne. Je me plaisais à l’imaginer apaisée et heureuse dans sa famille retrouvée. À Paris, après chacun de mes concerts, j’espérais la découvrir parmi ceux qui venaient me saluer. Son absence m’a laissé au cœur des gouttes de cristal vibrantes au moindre souffle du souvenir. Si vous le pouvez, venez à Vienne entre le 1er et le 15 février. Dites-moi votre date, je vous enverrai un billet d’avion. Dites-moi aussi comment vous reconnaître. J’irai vous chercher à l’aéroport. En mémoire d’elle, considérez-moi, je vous en prie, comme un vieil ami. » « J’arriverai le 7 février, répondit Virginie, par le vol qui me met à 18 heures à Vienne. » Puis, après un instant d’hésitation, elle ajouta : « Je ressemble à ma mère. »

Le plus dur lui restait à faire : annoncer son départ à mamy Pauline et à son père. Fallait-il les affronter ensemble, l’un après l’autre et, dans ce cas, par lequel commencer ? Elle choisit de parler en premier à sa grand-mère dont, elle le savait, il lui faudrait subir colère, mise en garde et conseils.



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